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les forçats du mariage

pectueusement. Chez lui aussi ce ravissement du cœur succédant à une souffrance aiguë avait vaincu l’ardeur des sens.

— Restez à dîner avec nous, dit-elle, et ce soir nous irons ensemble à l’Opéra.

— Mon adorée, c’est impossible. Il faut que je rentre ; une affaire urgente…

— Eh bien ! sacrifiez-moi cette affaire. Ne gâtez pas ce beau jour. Passons-le ensemble tout entier, je vous en supplie.

— Je suis engagé pour ce soir, reprit-il embarrassé. Mais si je le puis, je vous jure…

— Ce n’est pas une promesse cela, dit-elle impérieusement.

— Eh bien ! je vous promets, à moins…

— À moins que Marcelle ne vous retienne, n’est-ce pas ? acheva Juliette d’un ton irrité, sarcastique.

— Mais enfin, mon amie, si elle était au plus mal ! La quitter dans un moment semblable…

— Ah ! c’est cela ! Eh bien ! adieu ! adieu !

Elle s’élança dans sa chambre et s’y enferma.

À huit heures, Robert vint prendre Juliette pour l’accompagner à l’Opéra.

Mais il n’écouta point la musique. Il était pâle, défait, absorbé. Quand Juliette lui parlait, il entendait à peine. Elle lui pressa furtivement la main, le sollicitant du regard. Il ne répondit ni à son regard, ni à son étreinte.

— Adieu, dit-il tout à coup ; rester ici, c’est plus