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ce n’est les hommes ? qu’est-ce que le temps, si ce n’est leurs actes ? Vous attendez que le temps vous apporte, de siècle en siècle, un homme d’énergie, un homme d’action ? En vérité… votre génération elle est si pauvre ? La guerre ne vous a-t-elle pas appris comment l’on répare et l’on devance l’œuvre du temps, c’est-à-dire d’autres épaules… N’avez-vous pas tout ce qu’il faut pour agir ?

Peltier, cherchant à la calmer.

Tout cela finira… comme tout finit… la guerre tombera en désuétude…

Mabel, douloureuse.

Et nous n’aurons rien fait pour en hâter le moment… Cela finira… après une, après dix, après vingt autres guerres… Tout est à recommencer… Encore ces masques de cire sur des lits de morts… encore cette agonie, cet épuisement du pauvre visage humain… cette misère absolue, ce découragement de Christ sur la croix… Et cela, pour nous, les survivants… Parce que nous n’aurons pas voulu, nous n’aurons pas su, nous n’aurons pas osé… peut-être même nous n’aurons pas souhaité. (Elle s’angoisse, puis avec déchirement.) Ô mes bien-aimés !