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vous ne pouvez l’imaginer… La nostalgie de suivre, de continuer… de mettre mes pas dans les pas de mes frères… Je ne puis me voir que soldat. J’ai tant aimé ce métier comme un moine aime les règles de son ordre. J’ai aimé jusqu’à cela dont on se scandalise, jusqu’à l’empreinte en notre chair… jusqu’au silence et la passion.

Mabel

Il nous faut encore des soldats, Jean. Il en faudra longtemps !

Jean

Je sais que nous n’en manquerons pas… tandis que les autres… Lady Mabel, vous avez raison : le cœur ne fera rien, voyez les femmes, elles poussent à la roue. L’intelligence ne fera rien, voyez mon oncle, il en redemande ! Mais l’homme, enfin, mais l’énergie, mais l’action virile ? Laisserons-nous vivre le chancre au flanc de la patrie parce que cette lutte-là nous plaît moins, parce qu’elle est plus neuve et plus ingrate, mal soutenue par la foule et les femmes… Parce que, hélas ! il faut bien le reconnaître, parce que nous serons plus aimés soldats de la guerre que soldats de la paix ?… Oui, ce