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Dans le cas du gaz HCl, on trouve . Avec un grand réservoir, on obtiendrait dans le tube un enrichissement 1,43 par rapport à la composition normale. Avec un réservoir de l’ordre de 10 u, on séparerait dans celui-ci un résidu non aspiré d’un quinzième environ, avec un coefficient d’enrichissement 0,71. Pour obtenir le même enrichissement avec un tube sans réservoir, il serait nécessaire de séparer le deux centième seulement du gaz, tandis que la séparation d’un quinzième ne donnerait qu’un enrichissement de 0,8 ; le rendement est donc amélioré par l’emploi du réservoir.

Les considérations relatives à la centrifugation des gaz supposent que les lois des gaz parfaits se vérifient ; elles ne seraient donc pas valables numériquement si le gaz venait à se liquéfier par compression au fond du tube. Toutefois, qualitativement, les prévisions de la théorie devraient subsister. On suppose aussi que l’équilibre de régime est établi ; le temps nécessaire pour cela ne paraît pas devoir être élevé dans le cas des gaz. Aucune expérience de centrifugation des gaz n’a encore été réalisée.

43. Centrifugation des liquides. — Examinons maintenant la centrifugation des liquides, par exemple, celle du mercure ou du plomb fondu, en nous limitant au cas de deux isotopes. Les molécules du liquide sont soumises à la force centrifuge et à l’agitation thermique comme celles d’un gaz, mais elles obéissent aussi à leurs actions mutuelles. On peut admettre que ces forces s’exercent également sur deux molécules isotopiques, car les volumes atomiques, les compressibilités et les températures de fusion d’éléments isotopes ont les mêmes valeurs. Dans le mélange chacune des molécules isotopiques circule, par conséquent, avec la même facilité. Si un gradient de concentration vient à être établi dans le liquide pour chaque espèce de molécules, sous la réserve que la concentration totale reste constante, le liquide étant supposé incompressible, il ne résulte de là aucune force autre que l’excès de pression partielle, pour solliciter une molécule dans une direction déterminée. Dans la mesure où ces suppositions sont permises, les molécules d’une espèce se distribuent sous l’action de la force centrifuge et de l’agitation thermique suivant une loi statistique ; la concentration totale reste constante et l’énergie potentielle est donnée[1]. L’application de la méthode générale conduit à chercher la valeur minimum de l’expression.

  1. L’application des méthodes statistiques aux problèmes de physique a été exposée par P. Langevin, [87].