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il ajouta, comme s’il se fût agi d’une chose toute simple et résolue à l’avance :

— Donc, Arthur, c’est entendu, tu reviens chez nous !…

La misère et la désillusion sont de terribles dissolvants pour l’orgueil humain. Arthur avait le cœur bien fait. Cédant à un emportement de jeunesse il avait rompu avec le foyer, mais il s’était gardé de la corruption urbaine qui, trop souvent, atteint le campagnard, et du premier coup, jusqu’aux moelles. Il savait bien au fond de lui-même que Dieu le punissait. La ruine de son pauvre ménage par l’incendie, cette typhoïde qui, en épuisant ses dernières ressources l’avait mis à deux doigts de la mort, tous ces maux accumulés châtiaient — il le comprenait — l’insulte jetée à la face paternelle. À ce retour inattendu des choses, devant ce père qui s’humiliait et venait à lui en passant par son enfant, il porta la main à ses yeux. Un flot de larmes, accumulées comme l’eau derrière un barrage, débordèrent tout à coup, et il tomba à genoux en murmurant :

— Pardon, père, pardon !

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