Page:Marie-Victorin - Récits laurentiens, 1919.djvu/118

Cette page a été validée par deux contributeurs.

néanmoins les Delage, comme tous les résidents du Chemin de Chambly sont habitués.

Tout à coup une lourde machine qui a corné plusieurs fois franchit brusquement la barrière et vient stopper devant la maison. Le chauffeur allume un cigare tandis que deux messieurs descendent de l’arrière. L’un d’eux, gros homme à figure injectée de sang, tend au père Félix venu à leur rencontre une carte d’affaires que celui-ci lit distraitement.

— Vous êtes M. Félix Delage ? Je suis Stevenson, agent d’immeubles. J’ai des capitaux considérables à placer sur la Rive Sud. L’on m’a dit que votre terre n’est pas vendue et je viens l’examiner pour vous faire des propositions. Je suis un acheteur sérieux et pourrai vous fournir toutes les recommandations désirables.

— Mon cher monsieur, répondit Félix, quoique votre nom me soit parfaitement inconnu, je veux bien croire que vous êtes un acheteur sérieux, mais je dois vous dire tout de suite que ma terre n’est pas à vendre.

Stevenson ne parut pas avoir entendu. Allumant un cigare, il poursuivit, en homme habitué à cette entrée en matière :

— Je suis en état de vous accorder les meilleures conditions possibles, conditions où le comptant entrera pour une bonne part. Je vous