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LA MONTAGNE DE BELŒIL

splendide, la noblesse d’espérance et la grande sagesse du pays laurentien.

On resterait ici longtemps ! On voudrait voir le soleil entrer, au matin, en possession de son domaine, voir la nuit venir par le même chemin et prendre sa revanche ! On se reporterait facilement au temps où toute cette plaine n’était qu’une seule masse houleuse de feuillages, parcourue, le long des rivières, par des troupes de barbares nus. On verrait les chapelets de canots iroquois descendre rapidement sur l’eau morte ; on verrait les beaux soldats du Roi de France, dans leurs barques pontées, monter vers le lac Champlain, couleurs déployées. Sans doute, l’endroit où nous sommes était un poste d’observation, et pris par mon rêve, j’ai presque peur, en me retournant, de trouver debout sur le rocher, quelque guerrier tatoué d’Onondaga appuyé sur son arc !…

Mais non ! Tout cela est passé, sans retour, poussière et cendre ! Et même une autre histoire, superposée à la première, a disparu à son tour. Dans le rocher qui nous porte, sont encore visibles de fortes fiches de fer, restes évidents d’une construction ancienne. Il y eut ici, en effet, autrefois, un pèlerinage très fréquenté, et auquel reste attaché le nom de monseigneur de Forbin-Janson, le célèbre missionnaire français qui nous appelait « le peuple aux cœurs d’or et aux clochers