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CROQUIS LAURENTIENS

mise à courir le monde, par la route du firmament, tour à tour, vapeur, étoile ou perle !… Et tu t’en venais à ma rencontre, mignonne, et tout à l’heure, parmi tes millions de compagnes folâtres, tu me cherchais à droite, à gauche !…

Je t’admire, petit flocon de neige, ainsi posé sur un rayon de glace parmi les brins noirs de la laine, et j’ai peine à penser que, comme tous nos bonheurs d’ici-bas, tu n’es pas viable, qu’il faut que tu te fondes sous mon souffle ou que, sans m’avoir rien dit, tu t’en ailles te coucher avec l’infinie multitude de tes compagnes qui n’ont caressé personne, que nul œil n’a remarquées et qui attendront des semaines et des mois, le printemps meurtrier et libérateur.

C’est à regret que je te secoue de mon bras, fragile étoile venue des cieux, étoile de neige qui tombes, muette et blanche, sur mes habits !…


V


La neige tombe, muette et blanche, la neige
tombe sur nos cœurs !…


Ses premières légions nous retrouvent chaque hiver, moins jeunes, plus courbés et plus éteints. La première tombée trouve toujours en l’intime