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CROQUIS LAURENTIENS

Le voilà ! En effet, très loin, vers l’Étang-du-Nord, la lunette décèle une fumée visible seulement pour des yeux marins. Dans une heure, il sera ici. À peine le temps de ranger un peu nos belles récoltes d’hier et de ce matin, d’y glisser les valves si joliment rayées des palourdes roses, dons gracieux de nos amis du phare, et l’on saute en hâte, avec armes et bagages, dans une des barges qui vont au-devant du vapeur — il n’y a pas de quai à Brion.

Il a maintenant une figure d’ami, le Lady Evelyn, et quand il stoppe à un demi-mille de la côte pour se laisser entourer par l’escadrille d’embarcations, c’est un vrai plaisir de retrouver les têtes familières des gars de manœuvre et le sourire énigmatique du maître d’hôtel. Au travers des colis de toute nature qui montent ou descendent, passés dans de savants nœuds de matelot, nous nous hissons à bord, bonjourant une dernière fois nos hôtes charmants, avec ce petit serrement de cœur qui accompagne la rupture définitive des relations amicales, même celles d’un jour.

Le navire maintenant contourne Brion et nous voyons d’en bas les Temples du Flot, violés, découronnés de leur mystère par le grand soleil fouilleur qui les explore. Quelquefois la falaise devient unie comme un mur, et permet de détailler les centaines de strates horizontales et parallèles