Page:Marie-Victorin - Croquis laurentiens, 1920.djvu/216

Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
CROQUIS LAURENTIENS

ils élisaient domicile des noms qui en expriment un peu — et quelquefois beaucoup — le charme et la beauté, qui en rappellent aussi l’histoire et les traits saillants.

On aborde généralement l’Île du Havre-aux-Maisons par la Pointe-Basse — le cap Alright des Anglais — où il y a une anse de pêche et une demi-demoiselle coupée à pic, exposant au-dessus d’un beau quai, un énorme rétable de pierre grise. Deux milles de chemin nous conduisent à l’église, tout près de la Pointe occupée par les marchands et les entrepôts à poisson. Un étroit goulet, où entre la mer, sépare ici l’Île du Havre-aux-Maisons de celle de l’Étang-du-Nord.

Gaufrés sur le velours ardent de trois demoiselles qui se tiennent comme par la main, le fin clocher et le toit rouge de l’église s’aperçoivent de très loin sur la Baie de Plaisance. Du balcon du presbytère, bâti à vingt pas du rivage, les matins sont délicieux et j’envie le vénérable curé qui, depuis vingt ans jouit du privilège d’y voir lever le soleil, un grand soleil d’océan, un soleil alchimiste qui fait de l’or avec de la pierre, de la lumière et du bleu marine ! Le premier matin que j’y passai, la mer était si calme qu’à peine discernait-on un léger frémissement perdu sur la face de l’eau. Au loin, l’Île-d’Entrée, haute et moutonnée, et l’Île du Havre-au-Ber, couchée en long dans l’eau claire. Décrivant un grand arc dont je