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LE HAVRE-AU-BER

des clôtures de perches, courant parallèlement vers un horizon rectiligne ! Les premiers Acadiens qui, fuyant le fair play britannique, débarquèrent sur les rivages des Îles, s’y taillèrent des domaines limités seulement par leur fantaisie et la nature du terrain. Les divisions successives, en morcelant la terre à l’infini, accentuèrent cette irrégularité si bien, qu’aujourd’hui, les petites maisons blanches sont éparpillées sans ordre apparent comme une volée de goélands au repos sur une plage.

Ai-je dit que, au cours du temps, et pour les besoins du chauffage et de la pêche, les Îles ont été quasi complètement déboisées et que, faute de bois, les Madelinots brûlent tous le charbon de Pictou ? À l’est du Bassin cependant, il y a la Montagne, une très modeste montagne encore couverte d’une très modeste forêt. Au-delà, passé l’ancienne dune fixée par les épinettes et les lauriers, se déploie le Havre-aux-Basques, formé par l’île du Havre-au-Ber, l’Île de l’Étang-du-Nord et deux longues dunes — un grand havre aujourd’hui presque entièrement ensablé, où s’attachent des souvenirs qui sont quasi de la préhistoire. Québec n’était pas encore que déjà de hardis corsaires de Saint-Malo et des Basques de Saint-Jean-de-Luz y faisaient de fabuleuses chasses de morses et de phoques. Nous savons aussi que dès avant 1600, les aventuriers anglais