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LES MADELINOTS

d’enseignement, développé une littérature et un art nationaux. Nos frères les Acadiens, frappés dans leur chair et dans leurs biens, dispersés comme feuilles mortes par vent d’octobre, chassés de partout, et repoussés à coups de pique des rivages où venait toucher la proue de leurs barques, les Acadiens, dis-je, ont, un long siècle durant, dirigé tous leurs efforts vers la survivance, la concentration, réunissant toujours, sans se lasser jamais, les cendres dispersées de leurs foyers détruits ! Mis à la terrible école du malheur, ils eurent pour maîtres le crucifix et leurs prêtres, de qui ils apprirent la plus nécessaire et la plus ignorée de toutes les sciences, la science pratique de la vie.

Faut-il s’étonner cependant de ce que, courbés sous le labeur quotidien, loin des centres d’instruction, ils aient été privés longtemps — plus longtemps que nous — de la nourriture intellectuelle et de l’arme du savoir ? Et cette avance que nous avons sur eux — et que le peuple exagère certainement — n’est-elle pas pour quelque chose dans leur attitude à notre égard ? Mais j’ajoute tout de suite que les efforts surhumains d’un clergé ardemment patriote — du Père Lefebvre pour ne citer qu’un nom — ont maintenant assuré aux Acadiens cette nourriture et cette arme. Ils ont aujourd’hui une belle organisation d’écoles primaires, un enseignement secondaire en voie