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LA COCHE

A vous, amye,
Et vous à moy, le discours de sa vie !
Car entre nous sa trop faulse alquemie
Est descouverte,
Dont à moy seule en demeure la perte.
Vous ne sçavez si elle est meure ou verte,
Ceste douleur.
Plus il vous dit sa peine et son malheur,
Plus vous moquez de son mal, et couleur
Point n’en changez ;
Et puis de luy si fort vous estrangez,
Que je voy bien que mon tort vous vengez
Tout en riant.
Et je m’en vois à part, pleurant, criant,
Et Dieu et Saints requerant et priant
Pour mon aïde,
Car je n’y voy sans miracle remide.
Je l’ay perdu, et n’y ha croix ne guide
Qui radresser
Le sceust vers moy. Je ne le veux presser ;
Et si ne puys son amour delaisser,
Qui est plantée
Dedens mon cœur et sy tresfort entée
Que, bien qu’il m’ayt du tout mal contentée,
Je n’ay vigueur,
Force ou povoir de l’oster de mon cœur,
Qui est nourry et plein de sa liqueur,