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LA COCHE.

Par la pitié
Qu’aviez de moy, rabiller l’amitié
Dont je retiens moy seule la moytié.
Si vous avez
Peine à fuyr ce qu’aymer ne devez,
Que doy je avoir, sinon les yeux crevez
De lamenter
Celuy qui tant me souloit contenter,
Qui ne me veult plus aymer ny hanter ?
Las ! je le perds,
Qui fut tout mien, et à beaux yeux ouvers
Le voy fuyr, non pas par les desers
Ny lieu sauvage,
Mais droit à vous ; et devant mon visage
Il ha trouvé son saint pelerinage.
Il auroit bien
Changé en mieux, s’il ne sçavoit combien
Nous nous aymons, et que ce qui est mien
Est vostre aussi.
Il fuyt de moy, cerchant de vous mercy :
Pour vostre Non, il perd de moy le Si,
O cruauté !
En mon endroit par sa desloyauté,
Et dens son cœur par vostre grand beauté.
Car un seul compte
Vous n’en tenez. O mon Dieu ! quelle honte
Il doit avoir, et peur que je racompte