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COMPLAINTE

De ces buyssons, aussi de leurs piquures,
Où mon malheur (me chassant) m’a fait rendre,
En temps et lieu ta me viendras defendre,
Et soustiendras là sus au Ciel ma cause.
Et si Sathan mon adversaire cause
Que mon peché a bien pis merité,
Certes je dis que c’est la verité.
Je ne veux pas alleguer du contraire,
Mais, s’il te plaist bien tost le faire taire.
De luy comment ta prompte obedience
Allegera le faix de mon offence,
Et qu’en ta court les dons et avantages
Aux serviteurs valent mieux que les gages.
Je congnois bien et humblement confesse
Que, postposant ta divine promesse,
Si tu voulois la peine mesurer
Jouxte mes faitz, me faudroit endurer
Non un enfer, mais mille millions.
Pour tant de maux, delictz, rebellions
Que j’ay commis en trespassant ta Loy.
Mais toutesfois ma trescertaine foy
Ne permet pas que te face ce tort
De presumer le mien peché plus fort
Que n’est le don et entier benefice
De ta faveur et digne sacrifice.
Si mon procès en toy feut ventillé,
Si mon peché en toy feut flagellé,