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Ame, regarde en quel lieu tu t'es mise, Au fin mylieu du grand chemin assise, Où tous passans pour mal tu attendois. A autre fin, certes, tu ne tendois. Comme un larron caché en solitude, A les tromper tu mettois ton estude. Parquoy ayant ta malice acomplie, Autour de toy as la terre remplie De ton immunde et orde infection, Couverte l'as de fornication ; Ton oeil, ton front, ton visage et ta face Avoit changé du tout sa bonne grace ; Car tell' estoit que d'une meretrice : Et si n'as eu vergongne de ton vice.

Et le surplus que Hieremie dit, Qui contraingnoit mon cœur, sans contredit, De contempler mon estat malheureux, Et regretter par souspirs douloureux, L'heure, le jour, le temps, le mois, l'année, Que vous laissay, me rendant condemnée, Mesmes par moy jugeant mon cœur infame, D'estre sans fin en l'eternelle flamme. Ce craindre là (qui de moy ne procede, Mais vient de vous et tout plaisir excede), Prover. 15. M'avoit quasi par vive congnoissance De mon peché mise en desesperance ; Si n'eust esté que ne m'avez laissée.