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FARCE DES FILLES

La Seconde Fille.

Hau, grant Vieille, qui vous croiroit
En grand’ peine & douleur seroit,
Mais plus tost la mer haulseroit
Et le hault ciel s’abbaisseroit
Qu’il m’advint fortune pareille ;
Je ne croy point ceste merveille.

La Vieille.

Ma fille, par là passerez,
Et alors contrainte[1] serez
Dire : « La Vieille le m’a dict. »

La Première Fille.

Hau, de Dieu soit mon cueur maudit
Si je croy en vostre parolle.

La Seconde Fille.

Ny moy ; je ne suis pas si folle ;
Elle ne produict que malheur.

La Vieille.

Ha, vous aurez ung serviteur,
Qui vous fera propoz changer.

La Première Fille.

J’aymerois mieulx vifve enrager ;
Mon cueur sans amour demourra,

  1. Ms. : Contrainct vous.