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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS

d’autres fois tant recongneue en allant & venant par la France avec ses troupes, à la venue de l’Empereur en Champaigne & Saint-Dizier, il luy pardonna encor. Il fut mis en la Bastille & quicte pour trente mille escus de rançon. Il y eut aucuns grands capitaines qui dirent & opinèrent ne devoir estre traicté ainsy en prisonnier de guerre, mais en vray & vil espion, comme il en avoit faict la profession ; de plus qu’il estoit quitte à trop bon marché de sa rançon, car ce n’estoit pas le moindre larçin qu’il avoit faict en France de l’une de ses monstres. Enfin il fut mieux traicté qu’il ne valloit, disoit-on. » (T. Ier, p. 225 des Œuvres complètes, édition in-8o ; éd. Lalanne, I, 349-50.)

Le Comte Guillaume témoigna quelque regret de ses trahisons. Marguerite, dans une lettre adressée au Roi en 1536, s’exprime ainsi : « Le Comte Guillaume m’a dict que je vous escripve qu’il y a bien différence de purgatoire honteux d’Italie au paradis glorieux de ce camp & m’a dict des fautes passées, que j’aime mieulx qu’il vous compte que moy, &c. » (Lettres de Marguerite, &c., Ier recueil, p. 321). — L.

Dans l’épître envoyée par Marguerite au Roy son frère, avec une figure d’Abraham pour étrennes, on lit ces vers :

Puis, d’autre part, en mon esprit voyant
De mon Seigneur & mon Roy la foy vive,
Envers son Dieu sa charité naïve,
Me semble voir le second Abraam,
Qui vray David s’estoit monstré l’autre an
Exécutant les batailles de Dieu,
Et Dieu, pour luy bataillant en tout lieu
Et maudissant par ruine & par honte
Ses ennemis, tant que nul n’en tient compte,
Ce que l’on voit par le Comte Guillaume,
Lequel, servant le Roy & son Royaume,
S’estoit fait riche, craint & fort estimé,
Mais maintenant, fuitif, povre & blasmé,
Peult bien penser d’ont son honneur venoit,
Qui riche, heureux & craint le maintenoit ;

Voilà comment du Dieu de Paradis
Les ennemis du Roy sont tous maulditz.

L’édition du XVIe siècle de la Marguerite des Marguerites &, à sa suite, la réimpression de 1873, II, 203, donnent le compte Guillaume, ce qui me paraît une erreur d’impression venant des mots n’en tient compte du vers précédent. J’ai vérifié le manuscrit 12485 de la Bibliothèque, feuillet 112 verso ; l’on y trouve, comme il convient, conte, selon l’orthographe habituelle des Nouvelles.

Il n’en était pas besoin pour faire la correction, car il est évident