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DU TOME PREMIER

due, les cornes, les poignards, les pointes de toutes sortes, &c. » — P. Lacroix, éd. de 1858, p. 33.

IV. — Folle outrecuidance d’un Gentilhomme vis-à-vis d’une Princesse.

De 1520 à 1526. Historique. — L.

Page 285, ligne 13. — Il y avoit au pays de Flandres, &c. Brantôme, dans ses Vies des Hommes illustres & grands Capitaines françois, t. II, p. 162, dit, à propos de l’Amiral Bonnivet : « Il y a un conte dans les Nouvelles de la Reyne de Navarre, qui parle d’un Seigneur, favory d’un Roy, qui, l’ayant convié en une de ses maisons & toute sa Court, avoit faict une trappelle en sa chambre, qui alloit en la ruelle du lict d’une grande Princesse, pour coucher avec elle, comme il fist & y coucha, mais, comme dict le conte, il n’en tira que des esgratigaures ; toutefois c’est assavoir. Ce conte est de luy, mais je ne nommeray point la Princesse. »

Et aussi dans les Dames galantes, Discours IV, t. VII, [368], des Œuvres complètes, en parlant de Mme de Chastillon : « Ce fut celle-là qui bailla ce beau conseil à cette Dame & grande Princesse qui est escrit dans les Cent Nouvelles de la dite Reine, d’elle & d’un Gentilhomme qui avoit coulé la nuict dans son lict par une trappelle dans la ruelle & en vouloit jouir ; mais il n’y gagna que de belles esgratignures dans son beau visage, &, elle s’en voulant plaindre à son frère, elle luy fit cette belle remonstrance qu’on verra dans cette Nouvelle, &c… Et si voulez sçavoir de qui la Nouvelle s’entend, c’estoit de la Reyne mesme de Navarre & de l’Admiral de Bonnivet, ainsi que je tiens de ma feue grande mère, dont pourtant me semble que la dite Reyne n’en devoit celer son nom, puisque l’autre ne peut rien gagner sur sa chasteté. »

L’assertion de Brantôme est généralement regardée comme vraie. Il faut observer cependant que Marguerite a eu le soin de mettre dans son récit plusieurs circonstances de nature à dérouter les curieux. Ainsi Marguerite n’était pas veuve de deux époux, puisque le Roi de Navarre lui a survécu ; elle avait une fille de son second mariage, tandis que la Princesse de Flandre mise en scène n’avait pas d’enfants vivants de ses deux époux. La tentative de l’Amiral de Bonnivet ne peut avoir eu lieu qu’avant la bataille de Pavie (mars 1525), puisque ce beau & hardi séducteur y fut tué. En représentant la Princesse comme veuve, Marguerite a eu sans doute la pensée de rendre moins criminelle la conduite du Gentilhomme.

Hept. IV.
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