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QUARANTE SEPTIESME NOUVELLE


Deux Gentilz hommes vécurent en si parfaicte amityé qu’exceptée la femme n’eurent long temps rien à départir jusques à ce que celuy qui estoyt maryé, sans occasion donnée, preint soupçon sur son compagnon, lequel, par despit de ce qu’il estoit à tort soupçonné, se sépara de son amityé & ne cessa jamais qu’il ne l’eût fait coqu.


uprès du pays du Perche y avoit deux Gentilz hommes qui, dès le temps de leur enfance, avoient vescu en si grande & parfaicte amityé que ce n’estoit que ung cueur, que une maison, ung lict, une table & une bource. Ilz vesquirent long temps continuans ceste parfaicte amityé, sans que jamais il y eust entre eulx deux une volunté ou parolle où l’on peut veoir différence de personnes, tant ilz vivoient non seulement comme deux frères, mais comme ung homme tout seul.