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LJe NOUVELLE
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monastère jusques ad ce que ceste tempeste fut passée, ce qu’elle feyt le plus secrètement qu’il luy fut possible, mais non tant que le Duc n’en fût adverty, qui d’un visaige fainct & joyeux demanda à sa femme où estoyt ceste Damoiselle, laquelle, pensant qu’il en sçeût bien la verité, la luy confessa, dont il faingnyt estre marry, luy disant qu’il n’estoit besoing qu’elle fist ces contenances là & que de sa part il ne luy vouloyt poinct de mal & qu’elle la fist retourner, car le bruict de telles choses n’estoit poinct bon.

La Duchesse luy dist que, si ceste pauvre fille estoit si malheureuse d’estre hors de sa bonne grace, il valloyt mieulx pour quelque temps qu’elle ne se trouvast poinct en sa présence, mais il ne voulut poinct recepvoir toutes ses raisons, luy commandant qu’elle la feist revenir.

La Duchesse ne faillyt à déclarer à la pauvre Damoiselle la volunté du Duc, dont elle ne se peut asseurer, la supliant qu’elle ne tentast poinct ceste fortune & qu’elle sçavoit bien que le Duc n’estoit pas si aisé à pardonner comme il en faisoyt la mine. Toutesfoys la Duchesse l’asseura qu’elle n’auroit nul mal & la print sur sa vie & son honneur.

La fille, qui sçavoit bien que sa maistresse l’aymoit & ne la vouldroit poinct tromper pour ung