Page:Marguerite de Navarre - L’Heptaméron, éd. Lincy & Montaiglon, tome II.djvu/283

Cette page a été validée par deux contributeurs.


VINGT NEUFVIESME NOUVELLE


Un Curé, suprins par le trop soudain retour d’un laboureur avec la femme duquel il faisoit bonne chère, trouva promptement moyen de se sauver au dépens du bon homme, qui jamais ne s’en apperçeut.


n la Conté du Maine, en ung villaige nommé Carrelles, y avoyt ung riche Laboureur qui en sa vieillesse espousa une belle jeune femme & n’eut de luy nulz enfans, mais de ceste perte se réconforta à avoir plusieurs amys.

Et, quant les Gentilz hommes & gens d’apparance luy faillirent, elle retourna à son dernier recours qui estoyt l’Église & print pour compaignon de son péché celluy qui l’en povoyt absoudre ; ce fut son Curé, qui souvent venoyt visiter sa brebis. Le mary, vieulx & pesant, n’en avoyt nulle doubte, mais, à cause qu’il estoyt rude & robuste, sa femme jouoyt son mistère le plus secrètement qu’il luy