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SUR MARGUERITE DE NAVARRE

Dans son article de César Borgia, Brantôme raconte son entrée quasi-royale à Chinon en 1498, qui ressemble fort aux chapitres analogues du Roman de Jehan de Paris, &, après avoir parlé du petit nombre de mulets dont se contentoient les Rois de France, il ajoute :

« Je me souviens, moy estant petit garçon nourry en la Court de ceste grande Reyne de Navarre Marguerite, soubz ma grand’mére, sa Dame d’honneur & Séneschalle de Poictou[1], ne luy avoir jamais veu que trois mullets de coffre & six de ses deux litières, la première & la seconde ; bien avoit-elle trois ou quatre charriotz pour ses Filles. Aujourd’huy on ne se contente pas de si peu, ny hommes, ny femmes, &c.[2] »


J’ay eu d’autres fois un frère puisné qu’on appeloit le Capitaine Bourdeille, l’un des braves & vaillants Capitaines de son temps. Il faut que je die cela de luy, encore qu’il fust mon frère ; sans offenser la loüange que je luy donne, les combats qu’il a faits aux guerres & aux estaquades en font foy, car c’estoit le Gentilhomme de France qui avoit les armes mieux en la main. Aussi l’appeloit-on en Piedmont l’un des Rodomonts de là. Il fut tué à l’assaut de Hesdin, à la dernière reprise.

Il fut dédié par ses père & mère aux Lettres, & pour ce

    s’être plus fréquemment servie des deux devises : UNG POUR TOUT, qui se lit dans la première impression de ses Poësies, Alençon 1533, & PLUS VOUS QUE MOY. Celle-ci se trouve au bas de toutes les miniatures du manuscrit de la Coche, présenté à la Duchesse, & sur une des copies manuscrites de l’Heptaméron. On remarquera qu’elles aussi se peuvent comprendre de sa tendresse & de son admiration pour son frère.

  1. Louise de Daillon, femme d’André de Vivonne, Sénéchal de Poitou.
  2. Ed. Lalanne, Capitaines étrangers, II, 214.