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PROLOGVE.

de Dauid, & des autres aucteurs. Et ce contentement que i’en ay, me faict tant de bien, que tous les maulx qui le iour me peuuẽt aduenir, me ſemblent eſtre benedictions, veu que i’ay en mon cueur par foy, celuy qui les a portez pour moy. Pareillemẽt auant ſoupper ie me retire pour donner pasture à mon ame de quelque lecon, & puis au ſoir fais vne recollectiõ de tout ce que i’ay faict la iournée paſſée, pour demander pardon de mes faultes, & le remercier de ſes graces, & en ſon amour, crainte & paix, prends mon repos, aſſeurée contre tous maulx. Parquoy mes enfans, voila le paſſetẽps auquel me ſuis arreſtée, long temps apres auoir cherché toutes autres choſes, ou n’ay trouué cõtentement de mon esprit. Il me ſemble que ſi tous les matins vous voulez donner vne heure à la lecture, et puis durãt la meſſe faire voz deuotes oraiſons, que vous trouuerrez en ce deſert la beauté qui peult eſtre en toutes les villes. Car qui cognoiſt Dieu, voit toutes choſes belles en luy, & ſans luy tout laid. Parquoy ie vous prie receuoir mon conſeil, ſi vous voulez viure ioyeuſement. Hircan print la parolle & diſt : Ma dame ceux qui ont leu la ſaincte Eſcriture (comme ie croy que nous tous auons faict) confeſſeront voſtre dire eſtre veritable : mais ſi fault il que vous regardiez, que nous ne ſommes encores ſi mortifiez qu’il ne nous faille quelque paſſetemps & exercice corporel. Car ſi nous ſommes en noz maiſons, nous auons la chaſſe & la vollerie, qui nous faict paſſer, & oublier mille folles penſées : & les dames ont leur meſnage & ouurages, & quelquefois les dances, ou elles prẽnent honneſte exercice : qui me faict dire (parlant pour la part des hommes) que vous qui estes la plus ancienne, nous liſiez au matin de la vie que tenoit noſtre Seigneur Ieſus Christ, & les grandes & admirables œuures qu’il a faictes pour nous. Puis apres diſner iuſques à veſpres, fault choiſir quelque paſſetemps, qui ne ſoit point dommageable à l’ame, & ſoit plaiſant au corps, &

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