diſt à Guebron. Il me ſemble que le gentil-homme que vous louëz tant de hardieſſe, deuroit plus eſtre loué de fureur d’amour, qui eſt vne puiſſance ſi forte, qu’elle faict entreprendre aux plus couards du mõde, ce à quoy les plus hardiz pẽſeroient deux fois. Saffredent luy diſt : Ma dame ſi ce n’eſtoit qu’il eſtimaſt les Italiens gens de meilleur diſcours que de grand effect, il me ſemble qu’il deuoit auoir grande occaſion d’auoir peur. Ouy, ce diſt Oiſille, s’il n’euſt point eu en ſon cueur le feu qui bruſle crainte. Il me ſemble, diſt Hircan, puis que vous ne trouuez la hardieſſe de ceſtuicy aſſez louable, qu’il fault que vous en ſçachez vn autre, qui eſt plus digne de louange. Il eſt vray, diſt Oiſille, que ceſtui-cy eſt louable, mais i’en ſçay vn plus admirable. Ie vous prie, diſt Guebron, ſ’il eſt ainſi, que vous preniez ma place de nous dire quelque choſe honneſte, & digne d’homme hardy, comme nous promettez. S’il eſt ainſi, diſt Oiſille, qu’vn homme pour ſa vie & l’honneur de ſa dame, s’eſt tant monſtré aſſeuré contre les Millannois, & eſt eſtimé tant hardy, que doit eſtre vn qui ſans neceſsité, mais par vraye & naïfue hardieſſe, a faict le tour que ie vous diray ?
le vouloit faire mourir.
NOVVELLE DIXSEPTIESME.
n la ville de Digeon au duché de Bourgõgne
vint au ſeruice du Roy François vn
Comte d’Allemagne nommé Guillaume,
de la maiſon de Saxonne, dont celle de Sauoye
eſt tant alliée, qu’anciennement n’eſtoit
qu’vne. Le Comte autant eſtimé beau
& hardy gentil homme qui fuſt point en
Allemagne, eut ſi bon recueil du Roy, que nõ ſeulemẽt le print
en ſon ſeruice, mais le tint pres de luy & de ſa chambre. Vn iour
le gouuerneur de Bourgongne ſeigneur de la Trimouïlle (ancien
cheualier & loyal ſeruiteur du Roy) cõme celuy qui eſtoit
ſoupçonneux & craintif du mal, & dommage de ſon maiſtre,
auoit touſiours des eſpies à l’ẽtour de ſon ennemi pour ſçauoir