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dition : & ſi a (ſelon tout bon iugement) paſsé Boccace, es beaux diſcours qu’elle faict, ſur chacun de ſes comptes. Dequoy elle merite louënge, non ſeulement par deſſus les plus excellentes dames, mais auſsi entre les plus doctes hommes : car de trois ſtiles d’oraiſon, deſcrits par Ciceron, elle a choiſy le ſimple, ſemblable à celuy de Terence en Latin, qui ſemble à chacun fort aisé à imiter, mais à qui l’experimẽte, riẽ moins. Vray eſt, que tel preſent ne vous ſera point nouueau, & ne ferez que le recognoistre par heredité maternelle : toutesfois, ie m’aſſeure que le receurez bien, pour le veoir par ceste ſeconde impreſsion, remis en ſon premier estat : car (à ce que i’ay peu entendre) la premiere vous deſplaiſoit : non que celuy, qui y auoit mis la main, ne fuſt homme docte, qu’il n’y ait prins peine, & ſi eſt aisé à croire, qu’il ne l’a voulu deſguiſer ainſi, ſans quelque occaſion : neantmoins ſon trauail s’eſt trouué peu agreable. Ie le vous preſente donc, ma dame, non pour part que i’y pretende, ains ſeulement comme l’ayant demaſqué, pour le vous rendre en ſon naturel. C’eſt à voſtre Royale grandeur de le fauoriſer, puis qu’il est ſorty de voſtre maiſon illuſtre : auẞi en a il la marque ſur le front, qui luy ſeruira de ſauf-conduict par tout le monde, & le rendra bien-venu es bonnes compagnies. Quant à moy, recognoiſſant l’honneur que me ferez, à receuoir de ma main ce labeur de l’auoir remis à ſon poinct, ie me fentiray perpetuellement obligé à vous faire treshumble ſeruice.

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