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DE MARGUERITE DE VALOIS.

presentay le mal et desplaisir que ce m’estoit de voir le Roy mon mary en guerre contre le Roy, et de me voir esloingnée de luy ; que, pendant que cette guerre dureroit, il ne m’estoit honnorable ny bien seant de demeurer à la cour ; que si j’y demeurois, je ne pourrois éviter de ces deux malheurs l’un, ou que le Roy mon mary penseroit que j’y fusse pour mon plaisir, et que je ne luy servirois pas comme je debvois ; ou que le Roy prendroit soubçon de moy, et croyroit que j’advertirois tousjours le Roy mon mary ; que l’un et l’aultre me produiroient beaucoup de mal ; que je la suppliois de trouver bon que je m’esloingnasse de la cour pour l’esviter ; qu’il y avoit quelque temps que les médecins m’avoient ordonné les eaux de Spa pour l’eresipele que j’avois au bras, à quoy depuis si long-temps j’estois subjecte ; que la saison à cette heure y estant propre, il me sembloit que si elle le trouvoit bon, que ce voyage estoit bien à propos pour m’esloingner en cette saison, non seulement de la cour, mais de France, pour faire congnoistre au Roy mon mary que ne pouvant estre avec luy, pour la desfiance du Roy, je ne voulois point estre au lieu où on luy faisoit la guerre ; que j’esperois qu’elle, par sa prudence, disposeroit les choses avec le temps de telle façon, que le Roy mon mary obtiendroit une paix du Roy, et rentreroit en sa bonne grace ; que j’attendrois cette heureuse nouvelle pour lors venir prendre congé d’eux pour m’en aller trouver le Roy mon mary ; et qu’en ce voiage de Spa, madame la princesse de La Roche-sur-Yon, qui estoit là presente, me faisoit cet honneur de m’accompaigner. Elle approuva