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mange point de veau en toute la Russie, veu que c’est contre leur religion, puis ils obseruent quinze semaines de ieusne tous les ans outre le mercredy et vendredy de chaque semaine, qui fait pres d’vn demy an, ce qui rend la chair à bon marché, comme aussi les grains, desquels y a grand nombre, veu qu’ils ne sortent du païs, et la terre est si grasse et si fertile d’elle-mesme, qu’elle n’est jamais fumée, si ce n’est en quelques endroits, et ainsi auec vn petit cheual vn enfant de douze à quinze ans labourera vn arpent ou deux de terre par iour.

Combien qu’il y ait grande abondance de viures, et à bon marché, si est-ce que la commune se contente de fort peu, car ils ne pourroient fournir à la despence, n’ayans nulle industrie, et estans fort paresseux : car ils ne s’addonnent au trauail, ains sont tellement addonnez à l’iurognerie que rien plus, leur principal breuuage quand ils se recreent est d’eau de vie et de medon, lequel ils font de miel qui leur vient sans labeur et en grande abondance, comme on peut iuger par la grande quantité de cire qui se tire hors du païs annuellement. Ils ont aussi de la Ceruoise et autres breuuages de peu de valeur, tous indifferemment, tant hommes que femmes, filles et enfans, et les Ecclesiastiques autant ou plus que les autres, s’addonnent à ce vice d’iurognerie, sans mesurer leur portée, car tant que le breuuage dure, lequel il leur est permis de faire à quelque feste principalle en l’an, il ne faut pas espérer qu’ils cessent de boire iour et nuict iusques à ce qu’ils en voyent la fin, ie parle