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MARIAGE

attente fiévreuse et, pour secouer un peu l’impassibilité négligente de mon « mari-passeport », je l’avertis que, si nous n’embarquons pas le 29, je renonce à mes projets et je rentre à Palmyre.

Pour entrer à la Mecque, il suffit d’être pendant deux ans bonne musulmane, ainsi l’ordonne le livre. Je serai donc dans deux ans en mesure d’y aller.

Soleiman a pris goût à sa nouvelle situation. Il se jette à mes genoux, me baise les mains, me supplie de patienter. Tous les jours il va se rendre à la compagnie pour hâter et activer les démarches nécessaires. Il fera téléphoner au Caire, à Suez. Il est d’un optimisme radieux. Il réussira.

En attendant, me voilà partie pour errer dans cette abondance de lieux saints qu’est Jérusalem. Je vais du Jardin des Oliviers au Mur des Lamentations, de la mosquée d’Omar au Saint-Sépulcre. J’en arrive à oublier ma nouvelle religion et j’entre voilée dans ce dernier sanctuaire pour m’agenouiller, en bonne catholique, devant les trois empreintes bordées de cuivre et laissées par les croix du messie Jésus et des deux larrons.

Prosternée, j’embrasse les traces divines, lorsqu’en me relevant j’aperçois la silhouette d’une dame d’un certain âge qui habite l’hôtel où nous sommes descendus.

Je l’avais remarquée et sentais qu’elle s’intéressait à moi. Son regard stupéfait me fit comprendre le fâcheux d’une situation à laquelle je ne pensais même pas. Les convictions de Zeînab étaient restées dehors, mais j’étais entrée au Saint-Sépulcre avec son costume. Je restai en prières, gênée et sentant le regard de cette amie inconnue peser sur mol. Je voulais éviter de lier conversation avec elle, car il m’était impossible d’expliquer des faits que je ne voulais dévoiler à personne. Je restai donc plongée