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CONVERSION

Ce n’est pas que le décor y contribuât : un salon bourgeois aux fauteuils polychromes de velours. Les notables sont alignés le long du mur. Il y a là le cheik, le paskaté (premier après le cadi), un secrétaire, trois témoins et un avocat interprète.

J’écoute, debout, le cheik qui me parle, tandis que les autres approuvent en dodelinant de la tête.

— Femme, te fais-tu uniquement musulmane pour épouser Soleiman ? Par le Prophète, réponds.

— Pourquoi me convertirais-je, si ce n’était que pour épouser Soleiman ? Le musulman peut épouser une femme d’une autre religion. Si je suis prosternée devant Allah, c’est que je crois à sa toute-puissance.

Le consistoire se lève et forme un cercle autour de moi. L’avocat, un jeune homme vêtu à l’européenne et coiffé d’un tarbouche, se détache du groupe et s’avance en me demandant de répéter à sa suite, en français et en arabe, mot à mot : « Echadou Allah, Illallah, etc… » « Je jure qu’il n’y a qu’un Dieu, que Dieu seul est Dieu, que Mahomet est l’envoyé de Dieu. Je crois en ses apôtres, en ses livres et au jour dernier. »

Aucun blasphème contre la religion de mes ancêtres. Au contraire, une similitude frappante avec notre Credo.

J’ai juré. La cérémonie est pratiquement terminée, cependant je dois encore changer d’état civil. Il me faut choisir un nom arabe, je me décide pour celui de Zeînab, une des femmes préférées du Prophète et aussi celui de l’ancienne reine de Palmyre, Zénobie. Suit la partie administrative, c’est-à-dire la signature des témoins, du paskaté, du cheik et de Soleiman qui, ne sachant pas écrire, remplace sa signature par l’empreinte de son pouce, encré sur une