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ÉCLAIRCIES

Le roi étant à Djeddah, la ville entière est pavoisée de drapeaux, et de banderoles aux couleurs nedjiennes, vertes et blanches, mettent de la gaieté dans cette cité sévère.

Le canon tonne chaque jour.

J’envoie Soleiman voir le souverain, en lui faisant mettre ses plus belles « naouls » vertes et or, en lui donnant un kéfié neuf.

Peu sûre de lui, je décide en même temps, mais sans qu’il le sache, d’y aller de mon côté et je pars, non sans difficulté, en auto, accompagnée de Lotfi, garçonnet de douze ans et fils de Sett Kébir qui lui a recommandé de prendre grand soin de moi…

Le palais où habite le roi appartient à Soleiman Abdallah, ministre des Finances d’Ibn Séoud et, d’ailleurs, cousin de mon estimé mari Soleiman. C’est une vaste construction bleue, complètement isolée au milieu des sables, sur la route aux profondes ornières, qui mène à la Mecque.

De part et d’autre de l’entrée, une longue file de nègres monte la garde. Leurs robes rouges sont brodées d’or et doublées de violet, aux manches et dans le bas.

Ils sont droits, imposants, uniformément de très haute taille.

Ils ont pour arme des sabres d’argent gigantesques, dont la pointe recourbée s’appuie sur le sol et dont la garde leur vient à la poitrine.

Toute la couleur, toute l’allure de cette royauté hedjazienne est dans cette vision polychrome.

On n’a certainement jamais vu de femme venir seule ici, et une nuée d’hommes se précipitent sur moi en m’apercevant. Lotfi, ému, reste dans l’auto qui s’est arrêtée à une certaine distance. Je fais connaître à ceux qui m’entourent avec des poli-