Page:Marga Andurain - Le Mari passeport, 1947.djvu/121

Cette page a été validée par deux contributeurs.

107
LE HAREM

À l’aube, je m’éveille, brisée de courbatures, la tête lourde et plus épuisée que la veille. À neuf heures, les esclaves apportent l’el fatour, petit déjeuner constitué de pain fait à la maison, de fromage blanc de chèvre aigre et sale, sur lequel, aujourd’hui, les lettres du journal qui l’a enveloppé sont imprimées, puis d’oignons, de poireaux crus, avec les racines et les tiges vertes, qu’il faut commencer à manger par le haut, et enfin des haricots blancs, recouverts de beurre de brebis rance (semen).

Le pain affecte la forme d’une galette ronde, peu levée, faite de farine d’orge et d’eau de mer.

Difficile d’avaler ces horreurs.

Ensuite je demande à me laver.

Mais Fakria, avec une sorte d’ironie, déclare tout de même gentiment que le hammam commun ne doit pas être assez convenable pour mon usage.

Elle me fait alors monter dans le sien, qui dépasse les limites du confort courant : il y a, de fait, un seau d’eau de mer et un seau d’eau douce, avec le petit bol qui sert à s’arroser le corps…

Car, qu’on ne l’oublie pas, l’eau qui a touché les parties inférieures du corps ne doit jamais venir en contact avec les parties supérieures.

La loi musulmane, qui ne badine pas, exige effectivement que je commence à me verser de l’eau sur les épaules, puis le ventre, puis les cuisses et enfin sur les pieds. Se laver, ce qui s’appelle se laver en Occident, devient ici, avec ce rituel obligatoire, un problème des plus ardus.

Je m’en tire au mieux et, lorsque je reviens, Sett Kébir me dit avec onction :

— Il paraît que tu as de nouveau commis un péché !

— Pourquoi cela ?