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DJEDDAH

C’est qu’un seul infidèle, faufilé parmi des milliers de pèlerins, annule toutes les grâces du pèlerinage et pour tous. Je voulais me passer du consulat de France. Je n’ignore pas, en effet, par expérience, que les personnages consulaires n’ont partout qu’une idée : celle d’arrêter les désirs de leurs ressortissants, pour éviter les complications qui en résulter pour eux.

Mais il faudra bien y avoir recours.

Je demande au médecin de me faire conduire chez le consul de mon pays.

Il me répond froidement :

— Jamais ! Musulmane, tu ne dois plus avoir aucun rapport avec ces gens-là.

J’ai commis une terrible gaffe.

J’essaie alors d’obtenir d’aller à l’hôtel. Je voudrais retrouver un peu de ma liberté compromise.

La réponse est inflexible.

— Une femme musulmane ne doit pas aller seule dans un hôtel.

— Où vais-je aller puisque, selon toi, tout m’est interdit ?

Il me prie de patienter et recommence à téléphoner.

Je ne sais ce qu’il dit, ni à qui. Mais je comprends qu’il cherche un harem pour me loger. Enfin il termine en disant que la famille du sous-gouverneur m’accepte et qu’on va me mener chez lui.

Sous escorte, je pars dans un dédale infini de petites venelles en terre battue. Elles sont identiquement étroites, sombres et désertes. C’est que tout le monde est au pèlerinage. Nous voici devant une porte monumentale, encadrée de lanternes pendues au mur et pareilles à deux réverbères. La porte est grande ouverte, comme dans toutes les maisons arabes de Djeddah. Une nuée d’esclaves et de domes-