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IV
INTRODUCTION.

gestes ou à certains sons une signification conventionnelle. Ce mode d’expression, que beaucoup d’animaux possèdent à l’état rudimentaire, devait, dans l’espèce humaine, se perfectionner peu à peu et doter les différents peuples de langues plus ou moins claires et plus ou moins expressives.

Un degré plus avancé de civilisation vit naître l’expression graphique. Non pas seulement cette admirable invention de l’écriture qui fixe sur la pierre ou sur le papier les signes conventionnels du langage, mais le graphique naturel : celui qui, à toutes les époques et chez tous les peuples, a représenté les objets de la même manière, qui nous permet de suivre sur les stèles d’Égypte les scènes d’une civilisation disparue. Cette représentation graphique, si elle s’appliquait à la représentation des idées comme à la figuration des objets, constituerait la véritable langue universelle.

Au dix-septième siècle parut l’expression graphique des idées créée par le génie de Descartes. Bientôt, cette méthode servit à représenter des variations diverses, à faciliter la comparaison de certains phénomènes d’économie politique et sociale. On publia en Angleterre d’abord, puis en France, des tableaux qui exprimaient par les inflexions variées d’une courbe les variations successives qu’avait présentées la population d’un pays, sa richesse commerciale, sa production agricole ; on représenta de la même façon les phases successives d’une épidémie, les variations diurnes ou annuelles d’une température ; la physique et la chimie recoururent à ce mode de représentation. Depuis lors, la méthode graphique est définitivement formée. Aujourd’hui, elle tend à élargir son domaine et à s’appliquer à toutes sortes d’objets, portant partout avec elle l’exactitude, la concision et la clarté.

Du reste, le besoin d’une expression scientifique claire et