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débarrassé de neige, avait la couleur du bronze florentin. Une barranca, au fond de laquelle il nous fallut descendre, nous cacha bientôt ce décor agreste, que la province de Cailloma mentionne aujourd’hui dans son annuaire, comme une merveille végétale digne de l’admiration de l’étranger.

Jusqu’à quatre heures de l’après-midi nous eûmes un temps magnifique ; puis le soleil, après avoir pâli et rougi successivement, finit par s’éclipser derrière un amas de nuages, qui, passant, selon leur coutume, du jaune d’ocre au noir bleuâtre, nous dispensèrent bientôt, avec une incroyable munificence, l’éclair, la foudre et la grêle qu’ils portaient dans leurs flancs. Cette tempête, que nous supportâmes avec toute la résignation possible, se termina, comme toujours, par une neige abondante qui recouvrit si bien chemins et sentiers d’une couche uniforme, qu’au bout d’une heure de marche les Indiens qui nous précédaient s’arrêtèrent d’un air irrésolu, et, comme des limiers qui ont perdu la piste, tournèrent sur eux-mêmes en essayant de s’orienter. Le mieux eût été de les laisser faire ; mais don Estevan, qui ne vit dans ce temps d arrêt qu’un acte d’insubordination, leur cria brutalement de se remettre en marche et de ne faire halte que lorsqu’ils en auraient reçu l’ordre. J’eus beau assurer celui-ci que nous étions sur le point de nous égarer, si ce n’était déjà fait, l’insensé feignit de ne