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fidèles agenouillés sur une seule ligne. Chacun d’eux, selon la coutume, devait déposer dans le plat un réal d’argent, cette messe de la mita étant payée au curé par les fidèles eux-mêmes, ceux qui partent, bien entendu, et cela, en vertu d’un touchant usage qui remonte aux temps féodaux de la conquête espagnole. À la nonchalance que les contribuables affectaient dans leurs mouvements, on devinait sans peine que cet impôt en numéraire était peu de leur goût. L’Indien, qui foule d’un pied dédaigneux l’or et l’argent de ses montagnes, tient énormément à un sou de cuivre. Mais le bedeau, qu’une longue expérience avait familiarisé avec des scènes de ce genre, se contentait, pour peu que l’individu tardât trop à s’exécuter, à lui glisser sous le menton son bassin aux aumônes, et à relever graduellement la tête du patient, qui, honteux de cette manière de pilori, qui attachait sur lui tous les regards et provoquait en même temps quelques éclats de rire, abandonnait enfin son réal d’argent, non sans l’accompagner d’un profond soupir.

Quand le bedeau eut reçu les douze réaux qui lui revenaient, il rentra dans l’église. À l’issue de la messe, le curé se dépouilla de sa chasuble, et, ne conservant des insignes sacerdotaux que l’étole et le manipule, s’avança sous le porche, escorté du bedeau qui portait la croix et le bénitier. Là, le pasteur dit quelques prières, qu’il termina par une