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Je pus alors constater d’un coup d’œil que nous venions d’atteindre l’extrémité d’un vaste plateau incliné au levant, et dominant la plaine d’une hauteur de quelque huit cents mètres. Le sol de ce plateau, au lieu d’être formé d’un sable micacé, comme celui de la pampa d’Islay, ou d’un sable quartzeux, comme celui de la pampa de Clémesi, était composé d’ocre schisteuse et de fer spéculaire, auquel il devait sa teinte rougeâtre et le nom de pampa-colorada que lui donnent les gens du pays.

Du haut de cet observatoire, le regard, aussi loin qu’il put s’étendre, n’embrassait qu’une succession de sables et de cendres, d’assises de grès et de blocs de trachyte, dus au travail des volcans et au retrait des eaux. Pas un arbuste, pas un buisson ne tachait d’un point vert cette morne étendue, à travers laquelle le chemin que nous devions suivre déroulait ses contours sinueux, pareils à ceux d’une immense couleuvre.

Avant de tenter la descente du plateau, le mozo mit pied à terre, retira de ses sacoches quelques gousses d’ail et s’empressa de frictionner, avec ces caïeux odorants, la bouche et les naseaux de nos montures. Comme je l’interrogeais sur les motifs de cette action, il me répondit que c’était une manière de sels d’Angleterre qu’il donnait à respirer aux mules, afin de les prémunir contre les défaillances et le cansancio ou épuisement.