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hauteurs serpentait à travers ces verdures, entraînant, dans sa course folle vers l’Océan, les galets de son lit, qu’elle entrechoquait bruyamment. Le glapissement des renards et la note plaintive du chirote (turdus militaris) annonçaient l’approche de l’aurore.

Le jour commençait à poindre quand mon guide, obliquant à gauche, s’engagea dans un sentier étroit et montueux, le long duquel croissaient des touffes d’arbustes, qu’à l’odeur délicieuse de leurs fleurs je reconnus pour des myricas nains, du genre cérifère, particuliers à ces latitudes et que la science n’a point encore enregistrés. Ce sentier, que nous suivîmes pendant près d’une heure, nous conduisit au sommet des serros. Là, nous nous trouvâmes au milieu d’un brouillard si dense, qu’il était impossible de voir clair à quatre pas. Craignant que mon Palinure ne s’égarât à travers cet océan de brumes, je consultai ma boussole de poche et rapprochai vivement ma mule de la sienne, prêt à l’aider de mes lumières s’il en était besoin ; mais l’assurance avec laquelle il mit le cap au nord et se maintint dans cette direction me prouva bientôt que mes craintes étaient sans fondement. À mesure que la sérénité rentrait dans mon esprit, le brouillard pénétrait mes vêtements de telle sorte, qu’après une demi-heure de marche, je les sentis peser sur mon corps comme ces chappes de plomb dont Dante Alighieri couvre, dans son enfer, les épaules des hypocrites. Tandis