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— Oh ! pour monsieur, ce ne sera que dix-huit piastres !

— Comment, bourreau ! mais c’est le double du fret habituel !

— Monsieur a peut-être raison, me répliqua le drôle d’un ton patelin, mais je le crois trop généreux pour vouloir marchander avec un pauvre diable qui se verra forcé, pour tenir sa promesse, d’éreinter deux bêtes superbes !… »

Cet appel fait à ma générosité, réagit d’autant moins sur mon amour-propre, que l’éreintement de ses bêtes, dont parlait le mozo, me parut devoir entraîner quelque peu celui de ma personne ; mais le temps pressait, la discussion menaçait de traîner en longueur, et l’abandon de quelques piastres me semblant préférable à la perte de quelques heures, je me décidai à subir les prétentions du muletier. Toutefois, je lui signifiai que, si je n’étais pas rendu à Puno le 31 décembre, il ne recevrait que dix piastres.

« Corriente ! fit-il, tout joyeux à l’idée de m’avoir dupé, mais je tiens à avoir la somme entière. »

Le moment était venu de s’exécuter. J’appelai les Llipis, qui s’étaient discrètement tenus à l’écart, afin de n’avoir pas l’air d’écouter cette conversation, dont néanmoins ils n’avaient pas perdu un mot, et je les priai de réunir mes bagages, ce qui fut fait en un clin d’œil. Mes cartons et mes paquets, convenable-