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était l’effet de la curiosité, plus forte encore chez la vigogne que chez la femme.

Au sortir des neiges, nous entrâmes dans une région hérissée de collines basses, inégalement espacées et dont l’inclinaison d’ouest à est était remarquable. Un sable épais recouvrait le sol, jadis sillonné par les grandes eaux, et déguisait si bien les aspérités de la couche minérale, que toutes les lignes de ce paysage avaient je ne sais quoi d’empâté, de lourd et de difforme. La nature, comme pour atténuer la laideur du site, y avait semé quelques pauvres plantes. Nous vîmes, au milieu des mousses et des graminées, une renoncule du genre loasa, des myrtes nains à feuilles ténues, et des mamillaires cotonneux[1] autour desquels voltigeaient de petits oiseaux à peu près semblables au tarin d’Europe.

Cependant le soleil baissait rapidement ; les muletiers, craignant que la nuit ne nous surprît en route, nous engagèrent à presser le pas. Chacun reconnut tacitement la justesse de cet avis en appliquant deux coups d’éperon à sa mule, et pendant une demi-heure nous filâmes d’un train de poste. Alors il nous sembla que les collines rentraient en terre, que l’espace s’agrandissait ; des bouffées d’un air tiède arrivèrent jusqu’à nos poumons. El valle ! el valle ! crièrent à la fois les muletiers et les mozos.

  1. Mamillaria senilis.