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pour regagner le temps perdu. L’inclinaison du sol favorisait la marche des mules qui, repues et bien délassées, trottèrent vaillamment pendant une couple d’heures. Au bout de ce temps, nous atteignîmes les premiers escarpements de la sierra de Vilcanota, que depuis la veille nous avions relevée, et force nous fut de ralentir le pas. Nous profitâmes de ce changement d’allure pour examiner le paysage. À quelques détails près, il nous parut semblable à tous les sites qu’on rencontre au versant des Punas, situées entre deux Cordillères. C’était la même pauvreté de végétation, les mêmes accidents de terrain, et cette physionomie morne et désolée qui caractérise les hauts sommets, où le feu et l’eau ont tour à tour imprimé leurs traces.

À trois heures de l’après-midi, nous franchîmes la Cordillère à l’aide d’une de ces solutions de continuité que les commotions volcaniques y ont pratiquées et que les naturels appellent puneu (porte). Parvenus sur le revers oriental, nous eûmes devant nous, à douze ou quinze lieues de distance, le plus beau décor polaire que l’imagination puisse rêver. Deux Andes neigeuses, d’une hauteur de quelques milliers de mètres, aux talus rapides, aux faîtes dentelés, partant du nord-ouest et du sud-ouest, s’avançaient dans l’est à la rencontre l’une de l’autre et, près de se rejoindre, s’affaissaient brusquement, laissant entre elles une faille béante. Deux monta-