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d’un autre sexe, qui promettait, à défaut de plaisir, de varier un peu la réunion. La gaieté un moment troublée régna de nouveau. Notre amphitryon, malgré ses cheveux blancs, était d’une humeur très-folâtre. Ses lazzis et les santés qu’il portait tour à tour à chacune de ses hôtesses, lui attiraient de celles-ci de vives ripostes, assaisonnées d’un sel andaloux, qui me parut, comme mordant, bien supérieur au sel attique.

Tout en accablant le digne vieillard de leurs épigrammes, ces dames nous faisaient les honneurs de la table avec une grâce parfaite. Elles amoncelaient sur notre assiette des mets de toute sorte et veillaient à ce que nos verres fussent toujours pleins. Parfois elles poussaient la prévenance jusqu’à prendre du bout des doigts un morceau de viande qu’elles roulaient dons quelque sauce et portaient ensuite à nos lèvres. Ces gracieusetés étaient accompagnées de questions sur notre âge, notre patrie, l’état de notre cœur et notre position sociale. Elles nous parlèrent ensuite d’elles-mêmes. Elles habitaient les villages d’Ocongate, d’Acopia et de Sangarara. Invitées par le propriétaire de l’hacienda à embellir de leur présence la fête de Notre-Dame-des-Neiges — patronne de Lauramarca — elles avaient quitté leur domicile sans avertir leurs époux ou leurs pères, qui, n’étant pas compris dans l’invitation, eussent trouvé mauvais qu’elles allassent se