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teau admirable bâti sur quatre éléphants, où était aussi l’étendard royal ; mais aussitôt que l’armée de Naiam eut aperçu les enseignes et les camps de Koubilaï, elle fut saisie d’un grand étonnement, car le secours qu’elle attendait du roi Caydu n’était pas encore arrivé. Saisis d’épouvante, ils coururent à la tente de Naiam, qui dormait, et le réveillèrent. Il se leva et mit le plus promptement qu’il put son armée en bataille. C’est une coutume générale parmi les Tartares de sonner de la trompette et de battre de toutes sortes d’instruments de guerre, en chantant à perte d’haleine, avant que le roi ait donné le signal d’attaquer l’ennemi ; de sorte qu’après cette cérémonie faite dans les deux armées, le roi ordonna de donner le signal aux trompettes et d’attaquer les troupes de Naiam. Tout aussitôt le combat fut très sanglant, car l’air fut obscurci d’une grêle de flèches et de traits, et, les machines à jeter des pierres ayant été laissées, les adversaires se tuaient à coups de lances et d’épées. Naiam était chrétien de nom, mais il ne suivait pas les maximes de la religion chrétienne ; cependant il avait fait peindre sur son principal étendard le signe de la croix et avait beaucoup de chrétiens avec lui. Le combat dura depuis le commencement du jour jusqu’à midi ; il périt beaucoup de gens dans les deux armées, mais à la fin Koubilaï fut vainqueur et mit l’ennemi en fuite. Dès que l’armée de Naiam commença à fuir, ce prince fut pris, et une grande multitude de fuyards fut mise à mort.

V
De quelle manière mourut Naiam.


Le roi Koubilaï, ayant son ennemi entre les mains, ordonna qu’on le tuât sur-le-champ, pour punir sa témérité d’avoir osé prendre les armes contre son souverain et fomenté une si noire rébellion ; mais parce qu’il était de son sang, il ne voulut pas que le sang royal fût répandu, ni que la terre en fût imbibée, ni