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de la société ; M. le président de Saron, son protecteur, mathématicien habile, magistrat intègre, homme de bien, mais de race noble, possédant une grande fortune, la première dignité du parlement de Paris, tombe sous la hache homicide : M. de La Place, né pauvre, né plébéien, né géomètre, n’est pas même menacé. Durant la tempête il s’occupe dans une retraite profonde à méditer sur des objets bien supérieurs à tous ceux sur lesquels l’intelligence humaine s’était jusqu’alors exercée. Son génie trace l’Exposition du système du monde et son Traité de mécanique céleste. L’applaudissement universel est pour M. de La Place la première récompense de ses ouvrages immortels, la renommée porte son nom dans toute l’Europe savante, elle admire les miracles de son génie. Cette fumée, sous un autre régime, aurait été la viande creuse dont il lui aurait fallu se trouver satisfait ; toutefois, en entendant retentir à son oreille des éloges et des louanges, encore il eût été contraint de sortir chaque jour de son modeste bouge pour les savourer à quelques dîners, ou bien pour entendre répéter sur son passage en entrant à l’académie : O l’homme incomparable : O le puissant génie ! Des jouissances toutes spirituelles étaient alors l’unique loyer de l’esprit ; il devait être content de posséder seulement cha-