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toujours noble et généreuse se montra supérieure à l’adversité. Dépouillés de la majeure partie de leur fortune par les lois révolutionnaires, ils s’estimaient encore riches en distribuant eux-mêmes aux pauvres leurs aumônes, leurs consolations, leurs secours. Quel homme de sens auprès de telles cendres n’aurait pas dit repousser toute pensée d’orgueil ; cependant M. Sébastien Schacherer, cordonnier, breveté de S. A. S. Mademoiselle d’Orléans, n’a pas craint de faire graver lui-même durant sa vie cette épitaphe à sa future mémoire : « Bon époux, excellent père, fils respectueux et soumis, sincère et constant ami, il consacra ses jours pour le bonheur de sa famille, dont il fut sincèrement regretté (quelle prévision !) ; il sut, par ses talens (de cordonnier) et ses vertus sociales, mériter l’estime et la confiance des personnages de la plus haute distinction : tous ses jours furent marqués par un bienfait. » Ce cordonnier se dit plus heureux que Titus : cet excellent empereur perdit un jour. Il termina sa propre épitaphe, que mille personnes lurent comme nous lorsqu’il était plein de vie, par cette phrase : « Il fit élever ce modeste tombeau en mémoire de sa digne et respectable épouse, dans l’intention d’y être réunis pour l’éternité. » L’âme, surprise de ce miracle de vanité,