Page:Marchant de Beaumont - Manuel et itinéraire du curieux dans le cimetière du Père la Chaise.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Si, durant l’éclair de la vie, vous pouviez être arrogans du rang que vous occupez un moment sur la scène du monde, considérez dans cet espace (10e div.) combien l’orgueil vous abuserait étrangement en vous croyant à jamais supérieurs au reste des mortels. Dans une même poussière, on voit baronnes et marquises, le président Agier, M. le duc de Laval-Montmorency, pair de France, M. le prince de Castelcicala et madame Graux, maîtresse de pension, possédant pour dernière demeure une chapelle mortuaire, tandis que les plus modestes monumens recouvrent les restes des personnages les plus éminens, au milieu desquels repose M. Simon, père des cochers de fiacres. Ne vous fiez pas un instant sur votre prospérité ; la statue d’une femme éplorée, sur laquelle se fixe le regard dans la division no  11, est celle de madame Garreau pleurant son époux. L’ambition de son mari devait être satisfaite de se sentir riche, même fort riche, après avoir acquis une fortune dont l’humblesse de son premier état ne lui permettait pas même l’espoir ; il voyait avec complaisance chaque jour croître sa richesse, il achetait des domaines, il faisait bâtir des maisons, il jouissait d’une santé parfaite. Tandis qu’il considérait les progrès d’une construction s’élevant par ses ordres, la mort le précipita presque