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LES ENFANTS GÂTÉS

attribués à l’absence de système qui caractérise l’éducation en ce pays. Les facultés morales comme les forces du corps ont besoin d’un entraînement journalier pour se développer normalement. La charité, la probité, la générosité, le courage, l’amour de l’ordre et du travail, etc., doivent être mis en exercice dès l’éveil de la raison. Différer de cultiver chez l’enfant ces qualités est aussi déraisonnable que si l’on attendait l’époque où il ira à l’école pour lui apprendre à marcher. On trouve facilement, si l’on veut s’y appliquer, les occasions d’éclairer son intelligence et de former son cœur. Les petits incidents de chaque jour nous les fournissent. Dans le règlement des différends qui s’élèvent au milieu des jeux, dans les défenses que la prudence nous oblige de leur faire, dans la morale des histoires qu’on leur raconte, on peut placer autant de leçons sur la justice, la magnanimité, les avantages de la sobriété, ceux de la vertu. Le défaut d’un principe fixe inspirant tous nos actes nous entraîne dans l’erreur d’agir tantôt d’une manière, tantôt d’une autre, suivant les dispositions du moment. Ces tergiversations funestes déroutent les jeunes consciences et faussent à jamais le jugement de leurs naïfs témoins.

Cette étrange insouciance des parents à l’endroit de l’éducation morale de leur progéniture persiste encore quand vient pour cette dernière l’âge décisif de l’adolescence.

Les facultés étant alors dans toutes leurs forces et tout leur épanouissement demandent plus que jamais à être dirigées. Voici pourtant la conduite tenue par la majorité des pères instruits quand leurs filles sortent du couvent :

S’ils constatent dans une première épreuve que leur « graduée » ne saurait dire, sans hésiter, sous quel régime de gouvernement nous vivons, ni répondre à quelques questions sur l’histoire contemporaine de son pays, ni donner une idée même approximative du chiffre de