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LA MANIÈRE D’ÊTRE HEUREUX

tes. Une femme sensée et une bonne mère sait borner ses désirs.

Dans le logement il faudrait veiller tout d’abord au confortable, à la propreté absolue et laisser ensuite aux gens très fortunés la profusion des ornements coûteux. Je rangerais volontiers parmi ceux-ci ces mille riens faits de velours, de porcelaine peinte, de soie brodée et de dentelles qui obstruent les salons d’aujourd’hui. La confection de ces objets vole aux jeunes personnes un temps qu’elles pourraient employer plus utilement et détournent de la caisse familiale une infinité de petites pièces blanches si nécessaires et si précieuses en somme.

Je vous surprendrais peut-être en vous disant que de tous ceux qui possèdent un salon — et, dites-moi, qui est-ce qui s’en prive ? — la moitié n’en devrait pas avoir.

Des familles aux revenus les plus modiques ne songeraient jamais à se loger dans une maison qui n’a pas de salon.

Plutôt que de s’en passer on s’entassera, on s’écrasera dans les autres pièces ; on mangera dans une chambre noire et on couchera trois ou quatre dans une étroite mansarde.

La plus belle pièce, la plus grande, la plus éclairée est alors décorée du nom pompeux de salon, garnie de quelques meubles prétentieux et réservée pour les rares visiteurs qui l’habitent quelques instants.

Pourquoi ne fait-on pas du salon, comme en France, un lieu de réunion pour la famille, meublé avec plus de coquetterie, avec plus de luxe que le reste de la maison, mais dont on ne se fait pas faute de jouir.

Une large table au centre, recouverte d’un tapis avec une lampe à abat-jour, le piano dans un coin, la bibliothèque, le chevalet de la fille aînée ; près de la fenêtre une table à ouvrage, une petit secrétaire avec tout ce qu’il faut pour écrire ; à côté de la table un grand fauteuil pour le papa, une couple de bonnes berceuses, des