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NOS TRAVERS

ment le plus frivole se révèlent pourtant dans les situations les plus difficiles chez quelques épouses inexpérimentées, les élevant par une espèce de miracle à la hauteur de leurs obligations.

Bien que leurs braves cœurs dans les grandes occasions sachent ainsi se montrer héroïques, la futilité d’esprit et l’aveuglement de l’intelligence, qu’un grand nombre apportent en ménage en guise de dot, ne peuvent manquer, en face de certains problèmes dont la solution demande un jugement éclairé secondé par une grande force de caractère, de faire une désastreuse faillite.

Il y a des hommes qui se contentent d’une femme qui soit une habile ménagère et sache s’habiller. Ces deux conditions d’après eux suffisent pour « faire honneur à leur position. »

S’ils ne devaient pas avoir d’enfants, nous laisserions ces gens peu difficiles appeler tout à leur aise leur épouse-intendante un trésor ; mais dès que son titre de mère impose à celle-ci le devoir de conduire des âmes et de former de jeunes intelligences, ses talents domestiques deviennent insuffisants. D’inflexibles principes religieux et une bonne instruction doivent ajouter leurs lumières à la science utile de faire d’excellentes confitures, de bien tenir sa maison, et de dire avec grâce, peut-être même avec esprit, dans son salon, d’aimables banalités.

Aussi bien, sans ce secours surnaturel, à la meilleure des ménagères et à la mère la plus dévouée il manquera toujours quelque chose. Car c’est avec une intelligence éclairée qu’on forme des enfants sains de corps et d’esprit, comme c’est la résignation et l’humilité chrétiennes qui font accepter à une femme moins fortunée que ses compagnes l’infériorité relative de sa position.

La raison pour laquelle l’espoir des jeunes filles attendant du mariage une félicité sans mélange est souvent déçue, c’est que dans leurs rêves elles ne font pas la part des misères inhérentes à toute existence ; c’est qu’on a