Page:Marchand - Nos travers, 1901.djvu/135

Cette page a été validée par deux contributeurs.
139
LA VIE DE FAMILLE

La concorde absolue au sein de la famille est l’œuvre de la mère. La première — quels que soient ses tracas et ses croix — elle doit donner l’exemple de la résignation sereine et digne. Les malheurs domestiques sont allégés des trois quarts si les regards anxieux des petits lisent dans celui de leur mère l’expression d’un courage presque joyeux.

Ses différends avec son époux ne se règlent jamais en présence des enfants. À la table de famille à laquelle elle préside, aucune discussion acrimonieuse n’est tolérée, aucune querelle n’est vidée, et les arrêts de la justice paternelle sont réservés pour d’autres moments que ceux des repas. Ceux-ci sont de véritables agapes familiales où dans les bornes d’une tenue décente tout est gaieté, abandon et liberté d’esprit.

Une mère vraiment sage sait étouffer dans l’œuf ces germes de discorde qui tendent à se faire jour entre les enfants d’une même famille, et dégénèrent si on n’y prend garde en hostilité déclarée.

Il ne faut pas que la susceptibilité existe entre des frères et des sœurs, qui ne se doivent pas ménager les conseils et les avertissements. On est bien heureux dans les grandes familles d’être entouré de critiques bienveillants qui redressent nos petits travers et nous éclairent sur nos défauts.

J’ai toujours plaint les enfants uniques conservant toute leur vie certains ridicules dont personne ne se croit autorisé à les reprendre.

Ne connaissez-vous pas de ces maisons où l’on ne saurait se dire la moindre des choses sur un ton convenable ? Ces gens-là, le plus souvent, s’aiment bien au fond, mais ils semblent tous affectés d’une irritabilité nerveuse qui fait trouver suprêmement agaçant tout ce que les autres disent ou font. À force de se tendre les nerfs ainsi, on arrive à se faire mutuellement une vie d’enfer.

Je reçus un jour l’aveu d’une mère qui allait bien-